Interview de Christophe Meneust, journaliste chez Process Alimentaire.

Body

Interview de Christophe Meneust, journaliste Rubrique Porcédés chez Process Alimentaire.

 

 L’efficacité énergétique est un levier clef de compétitivité. Des progrès sont-ils encore possibles au niveau de la production de chaud, de froid et de vapeur ?

En effet, l'efficacité énergétique est un levier fort de compétitivité, une source d'optimisation des process et de réduction des charges pour les entreprises. Elle demande des investissements, mais de nombreuses aides sont disponibles pour franchir le pas (CEE, Fonds de chaleur, etc.) Des progrès sont toujours possibles, nous sommes pas arrivés au bout du progrès. Tant que les grains ( au sens large) surpassent les investissement, la machine n'est pas près de s'arrêter. Le défi actuel est d'intégrer des sources vertes et durables de chaleur ( biomasse, pompe à chaleur haute température, biogaz ou encore solaire thermique). Côté froid, la règlementation F-Gas ( qui organise la disparition des fluides réfrigérants hydrofluorocarbures en raison de leur potentiel de réchauffement planétaire (PRP extrêmement élevé) va également engendrer du changement dans les systèmes de production de froid.

 

De la récupération de chaleur ?

Je trouve intéressant de partager le retour d’un industriel. Lors de la construction d’une nouvelle usine, les équipes se sont inspirées de la méthode PINCH (ou méthode de pincement). Pour faire très simple, tous les endroits où il était possible de récupérer de la chaleur ont été étudiés. Ce qui est pertinent dans cette méthode, c’est de mettre en face les utilisations possibles et adéquates de cette récupération de chaleur. Le but est de récupérer ET d’utiliser cette chaleur. Si c’est pour « mettre le chauffage aux oiseaux », ce n’est pas pertinent. À titre personnel, je trouve que les progrès se feront sur la mutualisation. Par exemple, la récupération de chaleur sur un site industriel peut servir aux chauffages de bâtiments collectifs ou même des particuliers, à condition que ce soit en circuit court. Ce sont des projets qui commencent à émerger notamment dans certaines zones d’activités qui regroupent plusieurs typologies d’entreprises.

 

Et du pilotage des systèmes ?

Des avancées sur le pilotage des systèmes sont en cours avec l’inévitable intégration de l’intelligence artificielle ou encore le concept de jumeau numérique. Je trouve qu’ils sont particulièrement adaptés pour certaines activités (laiteries, fromageries, BVP, gestion de l’eau). Les avancées sur les technologies de capteurs accompagnent également les performances et l’autonomie des systèmes de pilotage des process. Des outils indispensables pour une bonne supervision des process.

 

Des process encore plus sobres sur le plan énergétique sont-ils envisageables ?

Oui, en intégrant les énergies renouvelables, mais aussi des équipements intelligents et plus sobres sur le plan énergétique ou encore en mutualisant certaines ressources entre entreprises voisines. C’est ce que Process Alimentaire met en avant avec le concours Energ’IAA. Cet événement met en lumière les entreprises agroalimentaires des régions Bretagne, Pays de la Loire et Normandie qui ont réalisé des actions significatives en matière d’efficacité énergétique et de décarbonation. Le prix sera remis lors du Cfia de Rennes dans l’espace Agora.

 

Dans le domaine du motion control, une révolution est en marche, celle des convoyeurs intelligents. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Le concept n’est pas nouveau, mais le marché semble de plus en plus prêt pour intégrer ces systèmes. Les besoins commencent à s’aligner avec l’offre du marché. Notamment sur la recherche de flexibilité des lignes, de traçabilité et de gain de place dans les usines, le tout en améliorant les conditions de travail des opérateurs. L’intégration de ces convoyeurs s’effectue principalement au cœur des machines.

 

La robotisation progresse-t-elle en industrie agroalimentaire, en particulier sur des opérations jusqu’alors difficiles à automatiser ?

L’intégration de robots, cobots, AMR, AGV répond à plusieurs défis. Parmi les premiers, le besoin de pallier au manque de main-d’œuvre dans les usines et d’améliorer la qualité de vie au travail (QVT). L’objectif est de focaliser les opérateurs sur des tâches à haute valeur ajoutée pour l’entreprise. Généralement, la porte d’entrée se fait en fin de ligne (conditionnement, palettisation, gestion de flux), mais elle gagne de plus en plus l’amont des process, sur des postes de tri ou certaines étapes particulières (nappage, dorures sur certains produits…).

 

 Observez-vous des évolutions en termes d’ergonomie des process ?

Oui, la technologie, mais aussi tout simplement le bon sens (notamment la prise en compte des premiers intéressés, les opérateurs) participe à l’amélioration globale des postes. C’est un levier de compétitivité pour les entreprises.

Particulièrement dans le domaine des opérations de tranchage et de découpe ?

Ayant travaillé dans ce domaine pendant six ans, l’amélioration de l’ergonomie a progressé notamment grâce à l’automatisation des lignes, la robotisation (notamment dans le porc) et les aménagements aux postes. Les équipements sont aussi plus performants, plus précis et valorisent de mieux en mieux la matière première (gestion des talons de coupes, atteinte du poids cible, etc.) Cependant, et c’est mon avis, le travail manuel n’est pas près de disparaître. Les tâches à effectuer pour désosser, dégraisser, dénerver sont complexes à faire pour un robot (notamment pour la filière bovine). De plus la matière première à un coût, il est indispensable pour les professionnels d’avoir des rendements les meilleurs possibles à une cadence optimale, sur ce point, le robot n’a pas encore dépassé l’être humain. L’amélioration de l’ergonomie des postes de découpe manuelle est liée à de bons équipements (couteaux, équipements, EPI etc.), des postes adaptables pour chaque opérateur, mais surtout une bonne formation aux techniques du métier. La transmission de compétences dans ces métiers spécialisés revêt d’une très haute importance pour la compétitivité des professionnels du secteur.

 

 La digitalisation des industries agroalimentaires se poursuit. Dans quels domaines les progrès sont-ils les plus porteurs en termes de performance ?

Un peu sur tous les domaines. Sur les ERP, traçabilité, pilotage, supervision, élaboration des plannings, mais aussi sur la communication en entreprise. À condition que ce soit pertinent et efficace.

 

Christophe Meneust​​​​​​​